Du fourrage 2024 au fourrage 2025 : les conseils pour réussir sa transition
Pour éviter une chute de la production laitière ou une perte de croissance chez les bovins en engraissement, il est conseillé de changer de ration progressivement pour une transition alimentaire en douceur, qu’il s’agisse d’un changement de silo ou d’un passage à la ration d’hiver pour les systèmes herbagers.
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Il n’y avait rien à pâturer dans les champs d’une bonne partie de la France cet été, alors dans nombre d’exploitations, cela fait belle lurette que les vaches sont rentrées au bâtiment. L’herbe a cessé de pousser fin juin, contraignant les éleveurs à puiser dans leurs stocks de fourrage. Par chance, 2024 était une année d’abondance, « la meilleure année que j’ai connue depuis 37 ans que je fais ce métier » observe par exemple Dominique Landais, consultant nutrition à l’entreprise de conseil en élevage Seenovia. Les stocks de maïs étant abondants, un bon nombre d’éleveurs commenceront tardivement à piocher dans le fourrage récolté cette année.
Transition du maïs de 2024 au maïs de 2025
D’un millésime à l’autre, le profil de l’ensilage de maïs varie. L’an, dernier, les maïs étaient très humides avec 24 à 28 % de matière sèche, une faible teneur en amidon parce que le grain n’avait pas fini de mûrir. Cette année, il devrait être plus fibreux, plus sec, avec davantage d’amidon.
Lors d’un changement d’ensilage, les micro-organismes du rumen doivent adapter leur métabolisme. Une transition trop rapide entre ces deux maïs peut entrainer une mauvaise digestion. Les vaches ne valorisent pas pleinement le nouveau fourrage et peuvent se retrouver en déficit énergétique. Il y a aussi un risque de subacidose. Principaux symptômes visuels : des bouses molles voire liquides contenant des grains, voire des boiteries dans les cas extrêmes. Il est donc indispensable d’intégrer 250 grammes de bicarbonate de sodium/VL/jour pendant les trois semaines de transition, tout en supprimant l’apport de sel dans la ration pour éviter un excès de sodium pouvant générer des œdèmes.
Attention aussi au maïs fraîchement récolté. « J’ai le cas d’un silo qui n’a pas eu les trois semaines de fermentation, il n’y avait plus de stock, il a fallu taper dedans, les vaches digèrent mal parce que le fourrage n’a pas fini de fermenter, il est encore chaud » rapporte Rudy Lavazais, conseiller à la chambre d’agriculture des Pays de la Loire. La valeur énergétique du maïs (UFL) se valorise mieux au bout de deux ou trois mois de fermentation (gain possible de 0,02 à 0,04 UFL/kg de MS).
Si le maïs constitue une part importante de la ration, il peut être intéressant de diminuer cette part plusieurs semaines avant la transition, pour diminuer l’impact du changement de millésime. Il s’agit alors d’incorporer de l’ensilage d’herbe ou d’intégrer 200g à 300g de paille broyée ou de foin pour apporter de la fibre et sécuriser ainsi la transition. « Certains éleveurs disposent de la paille broyée devant les logettes pour que les vaches puissent se réguler au besoin, et en période de transition on voit parfois des consommations de paille allant jusqu’à 700g par vache et par jour » observe Rudy Lavazais. La fibre préserve la rumination et la production de salive riche en bicarbonate.
Idéalement, la transition alimentaire doit se faire très progressivement, sur une période de trois semaines. D’un jour à l’autre, 95 % de la ration doit être la même. « Si on n’a pas compris que la flore microbienne d’un rumen doit mettre du temps à s’adapter, c’est une faute professionnelle » avertit Dominique Landais. Sur le terrain, les éleveurs sont généralement plus expéditifs.
Rudy Lavazais conseille d’analyser le fourrage ou d’estimer la valeur alimentaire avec le pourcentage de grains pour caler la ration et la fibrosité du maïs. S’il est riche en grain, diminuer progressivement la complémentation énergétique. Si c’est l’inverse, adapter la complémentation énergétique. Et s’il a une haute teneur en matière sèche, ajouter de l’eau. Ces analyses peuvent se faire ensuite tous les deux mois, une fois le maïs fermenté.
Transition du pâturage à la ration d’hiver
Après un été en bâtiment, les vaches sont de nouveau de sortie pour du pâturage d’automne dans un certain nombre d’exploitations, avant de rentrer prochainement pour la ration d’hiver. Pour les systèmes herbagers, dont la ration est constituée de deux tiers d’herbe et d’un tiers de maïs, la transition est plus simple, les risques sont réduits.
Avec le retour des pluies sur des sols très chauds, la minéralisation est importante, l’herbe est très riche en MAT (18 à 24%). Elle permet d’atteindre facilement l’autonomie protéique et de diminuer la consommation de correcteur. On économise les stocks, l’herbe pâturée coûte quatre fois moins cher que l’herbe récoltée.
Toutefois, des précautions sont de mise. L’herbe grillée d’été toujours présente à l’automne, dégage une odeur et diminue l’appétence. Il faut donc « viser des hauteurs d’entrée du paddock autour de 8 à 10 cm tout en conduisant en pâturage tournant pour apporter de l’herbe fraiche tous les jours pour stimuler l’appétit, avoir une hauteur de sortie homogène à 5 cm herbomètre et limiter les refus ». L’herbe d’automne est très tendre et riche en azote, « il faut vraiment en profiter, insiste Rudy Lavazais. On les sort tôt le matin après qu’elles ont fini les restes à l’auge de la ration qui aura été distribuée la veille au soir ». Elles doivent avoir faim quand elles sortent, sans pour autant avoir le ventre vide. Cela permettra de mieux valoriser l’herbe à pâturer.
Attention toutefois avec l’herbe très feuillue et riche en potasse, il arrive que le transit des vaches s’accélère. « La pire des erreurs, c’est de mettre les animaux dans une parcelle riche en légumineuses, trèfle, luzerne ou repousses de colza, et là on peut aller jusqu’à la météorisation » met en garde Dominique Landais. Il faut donc contrôler la durée d’accès au pré et apporter un fond de foin.
Pour une minéralisation adaptée, un apport de sodium, bicarbonate et oxyde de magnésium permet de tamponner le rumen, fabriquer de la salive, stimuler la rumination. « En pratique, dans l’organisation de la journée, on leur fait consommer d’abord la ration qui sécurise leur système digestif, donc un fond de maïs avec de la fibre, du foin, 4 à 5 kg de matière sèche, puis on sort les animaux au champ après », développe Dominique Landais.
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